Iran/Arabie Saoudite, une guerre froide orientale ?

 

Roosevelt ménage l’Arabie Saoudite afin de garantir l'approvisionnement Américain ( pacte du Quincy de 1945).

Roosevelt ménage l’Arabie Saoudite afin de garantir l’approvisionnement Américain ( pacte du Quincy 1945)

La fin de la seconde guerre mondiale annonce la suprématie américaine au proche-orient, les réserves de pétrole et la guerre froide en font un enjeu crucial pour Washington. La présence américaine impose une stabilité de façade dans toute la région pendant cinquante ans. La division séculaire chiite/sunnite s’efface face aux intérêts de l’hyperpuissance. En 1978, le régime pro-occidental du Shah d’Iran s’effondre face aux revendications sociales guidées par les islamistes. La révolution iranienne accouche d’une théocratie, qui se pose en leader de la religion chiite. L’équation créée par les américains glisse vers une bipolarité régionale, un axe Téhéran-Damas se dégage rapidement suite à une convergence d’intérêts. La guerre Iran-Irak ne fera qu’accentuer le clivage régional. Le camp occidental conserve la majorité des membres de l’OPEP et prend même le luxe d’incorporer l’Égypte, qui reconnait l’existence d’Israël (accord de camp David 1978). L’axe chiite comprend le Liban, la Syrie, l’Iran et une partie de l’Irak, ainsi qu’un certain nombre de pratiquant dans les pays du golfe. L’équilibre des forces étant en faveur des régimes pro-occidentaux aucune confrontation majeure n’eut lieu.

Le dirigeant égyptien et israélien s'accordent pour la paix

Le dirigeant égyptien et israélien s’accordent pour la paix

La faiblesse de l’Iran et de l’Irak avait jusqu’ici ôté toutes ambitions, mais la conclusion d’un accord sur le nucléaire iranien et la fin d’un embargo modifie le rapport de force. Le régime des ayatollahs légitime son exercice du pouvoir. La fin du blocus économique en juin avec la signature définitive de l’accord entérinera son statut de puissance régionale. De son côté, l’Arabie saoudite voit dans cette entente sur le nucléaire une volonté des U.S.A de se désengager de la région, à cela s’ajoute l’intervention iranienne en Irak contre l’État Islamique et l’appui aux révolutionnaires au Yémen. Si le riche État pétrolier n’intervient pas, la révolte chiite yéménite et la progression iranienne en Irak risque d’aviver les revendications de la minorité Chiite du sud de l’Arabie. Le 25 mars 2015, l’Arabie Saoudite rassemble une coalition sunnite et lance une offensive aérienne au Yémen contre les houthistes. La constitution d’une alliance rassemblant les grandes nations sunnites ne fait qu’aggraver le sentiment de persécution et de clivage entre les chiites et les sunnites.

Milice Houthiste, Sanaa janvier 2015

Milice Houthiste, Sanaa Yémen, janvier 2015

Ce schisme politico-religieux risque d’embraser un peu plus la région, l’État Islamique et Al-Qaïda en ressortent grandi, leur guerre sainte s’en trouve légitimé et leur recrutement facilité. Israël de son côté voit dans ce conflit l’opportunité de fixer l’attention des pays arabes et de les diviser. Il ne faut pas croire que les U.S.A. ou la Russie craignent un conflit dans cette région. Ces deux États sont autosuffisants en pétrole, la Russie trouverait même un débouché pour sa production avec l’absence des pays producteurs (Moscou connait un régime de sanctions économiques suite à son offensive en Ukraine). De son côté, l’Iran se trouve en position de force en soutenant les chiites, il se pose en défenseur et en leader. Avec cette guerre, il peut renforcer son influence, et acculer Riyad. Téhéran est tout aussi gagnant dans la paix, l’ouverture du pays lui assurera la suprématie économique. La baisse du prix du pétrole initié par le gouvernement des Saouds sape mais ne détruit pas l’économie iranienne, il la force même à se trouver de nouveaux débouchés. La stratégie de l’Arabie saoudite s’apparente à une nouvelle forme d’embargo contre l’Iran en rassemblement une coalition défavorable à son rayonnement. Il s’agit d’une part d’isoler économiquement le pays, et d’autre part affaiblir sa capacité militaire en soutenant ses ennemis. En faisant cela, la monarchie pétrolière ne risque-t-elle pas de souder un peu plus l’axe Téhéran-Damas, et de provoquer un conflit plus étendu ? Tout cela dépend de la volonté de Téhéran de poursuivre sa politique de renforcement. La première puissance qui reculera perdra toute crédibilité.

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